Le seigneur des porcheries de Tristan Egolf

La petite ville paumée du Midwest nommée Baker ne se remettra jamais du passage de John Kaltenbrunner en son sein. Des récits, des légendes  circulent sur ce personnage hautement controversé. Une chose est néanmoins sûre : John Kaltenbrunner a mis la ville sens dessus dessous. Pire, il fit de Baker une succursale de l’enfer. Mais qui est John Kaltenbrunner ? Pourquoi créa-t-il un tel cataclysme ? Ce sont les torche-collines, les éboueurs, qui racontent l’histoire de cet homme qui changea leur vie.

Je m’en tiens à ce résumé court pour ne pas déflorer le récit et parce qu’il est impossible de synthétiser ce roman foisonnant. Tristan Egolf écrivit son livre à 24 ans. Venu de Pennsylvanie, il ne trouva aucun éditeur aux États-Unis pour publier son premier roman. Il vint en France où il rencontra Marie Modiano qui, avec l’aide de son père, fit éditer le texte de Egolf. Sans le hasard d’une rencontre, la littérature aurait été privée d’un chef-d’œuvre.

« Le seigneur des porcheries » (sous-titré « Le temps venu de tuer le veau gras et d’armer les justes ») est une saga, une fresque consacrée à un anti-héros hors-norme : John Kaltenbrunner. C’est un personnage totalement barré comme presque seule la littérature américaine sait en créer. Kaltenbrunner est le petit cousin d’Ignatius Reilly, le fils caché d’Arturo Bandini. Le livre nous raconte sa vie de poissard à Baker. Les pires calamités vont s’abattre sur lui, une communauté entière semble décidée à lui pourrir la vie. Pourtant Kaltenbrunner ne demande que l’anonymat et la tranquillité. Il est à la fois brillant (à 9 ans il a retapé et est à la tête de la ferme de feu son père) et socialement inadapté. Être à part, il ne pouvait que se faire remarquer et Baker lui fait payer sa différence. Mais ce que Baker n’avait pas senti, c’est l’énergie rageuse qui habite cet homme. Sa vengeance sera inoubliable.

Et comment en vouloir à Kaltenbrunner de vouloir prendre sa revanche sur une bande d’alcooliques bigots et consanguins ? Tristan Egolf trace un portrait au vitriol de cette bourgade rurale. On imagine aisément qu’il s’agit de sa vengeance personnelle sur l’endroit où il a grandi. Un petit exemple des descriptions de Baker : « Année après année, le comté de Green se classe régulièrement parmi les cinq premiers du pays en terme de consommation d’alcool par habitant. Presque tout le monde à Baker boit en vertu d’une nécessité terrifiante. Un jeune homme peut difficilement se faire accepter parmi les adultes avant d’avoir plié au moins un pick-up autour d’un poteau téléphonique dans un état d’hébétude alcoolique. » Inévitablement, les fins de soirées se traduisent par des insultes, des bris de verre et des pommettes amochées.  Une communauté pourrie jusqu’à la moelle, abrutie par l’alcool et la violence qui n’aura pas volé la leçon donnée par John Kaltenbrunner.

Son épopée ne serait pas la même sans la langue de Tristan Egolf. Celle-ci est imagée, puissante et crue. L’auteur utilise avec un humour redoutable les comparaisons et les analogies.

Je le redis, « Le seigneur des porcheries » est un chef-d’œuvre d’imagination, de création et d’écriture. Une fois le livre refermé, il est impossible d’oublier John Kaltenbrunner et l’ouragan qu’il déchaine sur sa communauté dépravée.

Logo mois américain

13 réflexions sur “Le seigneur des porcheries de Tristan Egolf

  1. Bon, il me faut ce livre, c’est clairement une histoire comme je les aime. On sent bien que ton billet t’a accrochée.

    Et super pour le concours, il y en a trois que je n’ai pas.

  2. Un grand merci pour ce concours. Un roman de cette sélection me tente beaucoup. Je t’ai envoyé mon mail. Ce mois américain fut un tel plaisir que j’espère que tu le renouvelleras dans deux ans!

  3. Joli concours ! Je viens de t’envoyer un mail. Merci aussi pour Le Mois Américain, auquel je regrette de n’avoir pu participer davantage. J’ai encore des tas de lectures en réserve.

  4. Mais c’est que tu nous gâtes énormément ! Merci pour ce concours et ce mois américain même si les deux livres que j’ai lus ne sont toujours pas chroniqués…

  5. Il fait partie des livres que j’ai noté depuis des années et que je n’ai toujours pas eu le courage d’ouvrir (peur de ne pas aimer), mais ton avis donne envie de le découvrir !

  6. Ton article me donne bien bien envie de le lire ce bouquin ! Tiens, je participe au concours du coup ^^ (je viens de t’envoyer un mail). Merciiiiiiiii et biz !

  7. @Lilly : C’est vraiment un livre génialissime, j’ai eu du mal à quitter John Kaltenbrunner. Merci pour ta participation, je ferai un tirage au sort en fin de semaine.

    @Valérie : Un grand merci à toi pour tes nombreuses participations durant ce mois américain et ton idée de le refaire dans deux ans est très bonne. J’ai du temps pour songer à un nouveau logo !!!

    @Miss Léo : Merci pour ta participation j’annoncerai les résultats du tirage au sort en fin de semaine. C’est toujours pareil les mois thématiques, on aimerait que ça dure plus longtemps pour écluser sa PAL ! J’ai moi-même encore pas mal de livres américains.

    @Maggie : Tu te feras un mois américain à part avec quelques semaines de décalage ! Merci pour ta participation au jeu et résultat du tirage au sort en fin de semaine.

    @Cartons d’Emma : Il fallait fêter dignement la fin du mois de septembre et vous remercier de vos participations nombreuses.

    @Lou : Tu es revenue juste à temps pour participer, quel sens du timing !!! Les autres romans d’Egolf sont très en dessous de celui-ci qui est un véritable coup de maître.

    @Adalana : J’ai longuement hésité avant de l’ouvrir, j’avais également peur de ne pas aimer. Il ne faut pas te laisser effrayer par la première phrase qui est longue et à laquelle on ne comprend pas tout. Tout va s’éclairer petit à petit et cela vaut vraiment la peine de s’accrocher au début.

    @Jo : Merci de toujours suivre mon blog, cela me fait très plaisir. Je suis contente de t’avoir donné envie de lire le Tristan Egolf, c’est un livre qui est rentré directement dans le panthéon de romans inoubliables.

  8. Merci de m’avoir fait découvrir le Festival America.<
    Merci pour ce concours.
    Je t'ai envoyé un mail il y a quelques jours pour le concours, le commentaire ajouté au même moment, n'a pas abouti…
    Je retente l'envoi…
    Bonne journée.

  9. @Manu : C’est un livre qui m’impressionnait aussi. Le prix Campus a été l’occasion de me jeter à l’eau et je n’ai vraiment pas regretté.

    @A propos des livres : Je suis bien contente de t’avoir fait découvrir ce formidable Festival qui malheureusement n’a lieu que tous les deux ans.

  10. Pingback: 10 ans ! | Plaisirs à cultiver

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