Jézabel de Irène Némirovsky

9782253157779

Gladys Eysenbach est dans le box des accusés. C’est encore une belle femme malgré son âge. Elle accuse néanmoins la fatigue du procès et des témoignages qui se succèdent. Gladys est jugée pour le meurtre d’un  jeune homme de 20 ans, Bernard Martin, probablement son nouvel amant. La vie de Gladys est exposée aux yeux de tous durant le procès : sa richesse, son oisiveté, ses voyages, sa liberté, ses nombreux amants. Elle aimerait que le procès s’arrête, que personne n’entende les témoins. Elle a reconnu le meurtre, cela ne suffit-il pas ? « Je mérite la mort et le malheur, mais pourquoi cet étalage de honte ? »

Dans la première partie du roman, Irène Nemirovsky nous présente une femme accablée par ce qu’elle a fait, ravagée par la douleur et les larmes. Gladys fait peine à voir. La deuxième partie revient sur sa vie, de l’âge de 18 ans au meurtre de Bernard Martin. Et c’est une toute autre femme que l’on découvre. Gladys est terriblement belle et elle en a pleinement conscience. A 18 ans, elle se rend compte que son physique parfait lui donne le pouvoir sur tous les hommes. Aucun ne peut lui résister. Sa vie ne tourne  plus alors qu’autour de son pouvoir de séduction et du désir des hommes. « L’amour, le désir d’un homme, ces mains tremblantes, ce zèle à la servir, ces regards amoureux, jaloux, de cela elle ne se lasserait jamais. »

Mais le temps passe et fane la beauté. Gladys devient obsédée par son apparence et son âge. Elle est égoïste, capricieuse et affreusement orgueilleuse. Elle est prête à tout pour cacher son âge : falsifier ses papiers d’identité comme gâcher le bonheur de sa fille. La compassion que nous pouvions ressentir pendant le procès s’évanouit au fur et à mesure que nous découvrons la véritable Gladys Eysenbach. C’est un personnage à la Dorian Gray, elle est prête aux pires horreurs pour conserver son infinie beauté. Comme le personnage d’Oscar Wilde, elle s’avère hideuse à l’intérieur. Le portrait que dresse ici Irène Nemirovsky est accablant pour Gladys. D’une grande finesse psychologique, il est également d’une grande cruauté.

« Jézabel » est un court mais dense roman qui présente un personnage de femme vénéneuse et particulièrement odieuse.

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30 réflexions sur “Jézabel de Irène Némirovsky

  1. J’ai beaucoup aimé ce roman. J’ai entendu une émission sur Irène Nemirovsky sur France Inter et ils disaient que c’était un portrait de sa mère. Glaçant.

  2. Pingback: Irène Nemirovsky, Chaleur du sang | Ellettres : des lettres et des ailes

  3. J’ai écouté la même émission qu’Estelle et en lisant ton billet, je pensais bien sûr à sa mère ! Je ne l’ai pas lu celui-là.

    • C’est vraiment un terrible portrait de femme et de mère. En lisant, je n’ai pas pensé qu’il pouvait s’agir de sa mère alors que je connais leurs relations compliquées.

    • J’ai commencé avec « Suite française » lorsqu’il avait reçu le prix Renaudot et j’avais été enchantée par ma lecture. Depuis, je découvre le reste de son oeuvre qui fort différente mais tout aussi exigente.

    • La relation complexe entre la mère et la fille explique tout à fait cette obsession et en tant que lecteur nous ne pouvons que nous en réjouir.

  4. J’avais adoré Suite française cet été! Je me suis achetée un roman de l’auteur pour poursuivre ma découverte mais ce n’est pas celui-ci. Je l’achèterai parce que tu en parles très bien et que cela donne envie !

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