Une photo, quelques mots (155ème) – Atelier d’écriture de Leiloona

Résumé des épisodes précédents : Après s’être débarrassé de sa femme grâce à son petit bateau  de plaisance (atelier d’écriture n°153), Henry Wilson revenait vivre dans sa chère ville de New York. Mais la vie avec June étant pleine de surprises, il avait été obligé à 64 ans de se remettre à travailler… comme gardien d’immeuble, lui que se rêvait journaliste au New Yorker. Une retraite pas aussi paisible qu’il l’espérait…(atelier d’écriture n°154)

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© Romaric Cazaux

Qu’est-ce qu’ils font ces flics ? Qu’est-ce qu’ils me veulent ? Pourquoi restent-ils là ? Ils complotent encore contre moi. Pas la peine de vous torturer les méninges, je suis plus malin que vous. Vous n’avez aucune preuve contre moi. Vous n’avez même pas retrouvé le corps de June ! Ils pensent que je vais craquer sous la pression, qu’en m’espionnant continuellement, je vais finir par avouer. C’est mal connaître Henry Wilson ! Je le vois leur manège. Ce matin encore, un flic était devant mon immeuble. Il faisait semblant de s’occuper de la circulation. Mais moi, je sais qu’il était là pour moi. Ils sont après moi depuis des semaines.

Comment je le sais ? C’est June qui me l’a dit. Elle n’arrête pas de me parler, de me railler. Elle dit que sa mort ne restera pas impunie, que je ne vais pas m’en sortir à si bon compte, qu’elle travaille depuis l’au-delà pour que les flics m’attrapent. Fous-moi la paix June ! Je ne t’ai pas tuée pour que tu continues à me pourrir la vie. Vas-tu te taire à la fin ? Et ce rire… ce rire démoniaque m’est insupportable.

Il faut que je rentre. Chez moi, je serai à l’abri. Ils ne peuvent rien contre moi. Là-haut, dans ma chambre, je ne crains rien, je suis bien caché. Même l’ascenseur de l’immeuble ne va pas jusqu’à ma soupente. J’y suis incognito. Personne n’ose parler au vieux fou qui marmonne tout seul. Je les vois leurs regards en biais lorsque je les croise, leurs airs dégoûtés par mon allure. Mon odeur les fait frémir. J’ai arrêté de me laver pour qu’ils s’éloignent tous ! Je suis sûr que la police a placé des espions dans l’immeuble. Ils ne m’auront pas. Jamais !

Je vais bien me calfeutrer, mettre mes meubles derrière la porte. Je ne vais pas faire de bruit. Personne ne saura que je suis là. Les flics ne me retrouveront pas. Si seulement June pouvait la fermer. Elle m’assomme, me donne mal à la tête. J’ai envie de me percer les tympans pour que ça cesse. Sa voix remplit toute la pièce, elle empoisonne mon oxygène. J’ai besoin d’air. Je m’asphyxie.

Vite ouvrir la fenêtre. L’air frais de février me fait du bien. Tout est calme au dehors. Encore une fois, la neige étouffe les sons de la ville. Comme il serait agréable de s’allonger en bas sur le trottoir, dans l’épaisse couche de neige. June n’a jamais aimé la neige. Le froid réussirait peut-être à la faire taire. Je veux juste un moment de paix, juste un instant de silence. Le trottoir en bas m’appelle. Il suffit juste de sauter, de plonger dans le vide pour ne plus l’entendre. Juste un petit effort Henry. Dans quelques secondes, ce sera le calme absolu. Enfin.

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39 réflexions sur “Une photo, quelques mots (155ème) – Atelier d’écriture de Leiloona

    • Es-tu sûre qu’il a sauté ? 😉 Honnêtement je ne sais pas encore si Henry reviendra mais je me suis laissée une petite option. Non, le crime ne paie vraiment plus !

        • J’ai pensé à Henry en voyant la photo de cette semaine 😀 Je me suis dit qu’il avait dû trouver un coin tranquille ! (et là, tu annonces qu’il ne revient pas lundi ! Je me sens comme une lectrice de Sherlock Holmes quand Conan Doyle l’a fait tomber à Reischenbach !)

        • J’aurais presque envie de le faire revenir juste pour te faire plaisir ! J’ai bien pensé le faire visiter Madère pour une vraie retraite paisible mais ça n’était pas très cohérent avec sa paranoïa. Et je crois qu’il faut que je le laisse un peu tranquille sinon je vais écrire tous mes ateliers d’écriture sur lui ! Mais j’essaierai de le faire revenir d’ici quelques temps.

    • Pas sûr que l’histoire Henry soit finie…on verra selon l’inspiration et les photos ! Peut-être reviendra-t-il dans quelques temps, merci en tout cas pour ton message qui me fait plaisir.

  1. Oh mais non ! Quel dommage de l’avoir rendu pathétique, il s’était enfin débarrassé de cette poison de June, il pouvait enfin goûter au bonheur et tu lui flanques la voix haïe dans son esprit. Mais tu es sadique, en fait, Martine ! 😛
    Rondement mené, et j’espère vraiment qu’il n’a pas sauté. 😉

    • Je me suis également dit que j’étais un peu dure avec ce pauvre Henry ! Je me suis trouvée bien morale sur cette histoire !!! Je me suis laissée la possibilité de le retrouver, on verra si une prochaine photo s’y prête.

  2. Chez moi aussi les morts parlent . Mais je ne pense pas qu’il va sauter. ou alors il va se rater. il ne peut pas toujours fuir….
    Toujours fort, je ne veux pas que ce soit le dernier épisode…

    • Je me suis laissée une porte ouvert au cas où j’aurais envie de revoir Henry ! On verra selon les photos et l’inspiration. Pour le moment, je ne vois ce qu’il pourrait devenir après ce texte. En même temps, je ne savais pas qu’il aurait droit à trois textes lorsque j’ai écrit le premier ! Je te remercie pour ton commentaire qui me fait vraiment plaisir.

  3. Pingback: Conciliabule (Atelier d'écriture) | Bric à Book

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