Dark Island de Vita Sackville-West

dark island

Chaque été, la famille Wilson se rend au même endroit : Port-Breton. Ils y ont leurs habitudes et le lieu les séduit toujours autant. C’est surtout le cas de leur fille Shirin, envoûtée par la vue de l’île de Storn que l’on voit de Port-Breton : « Elle alla chercher, bien caché sous ses mouchoirs, un portefeuille en cuir dont elle retira une photo de la côte prise depuis Port-Breton, avec au premier plan la mer, immense, lumineuse, et tout au fond l’île beaucoup plus sombre de Storn. On ne discernait pas le détail, seulement une forme forme lointaine et les deux hautes tours rondes du château normand. Jamais elle n’avait regretté que sa photo ne soit plus précise. C’est ainsi qu’elle la préférait : obscure, mystérieuse, à l’écart des rayons de soleil trop directs, à l’opposé des contraintes prosaïques de la vie quotidienne, de sa médiocrité pénible, de ses faux-semblants. C’était son domaine privé, son refuge, qui la protégeait de sa famille, de Dulwich, et aussi d’elle-même. » Un été, le rêve de Storn se concrétise en la personne de Venn Le Breton, le futur propriétaire de l’île. Les deux jeunes gens passent la journée ensemble. Shirin découvre Storn de l’intérieur et s’imagine habitant les lieux. Shirin et Venn, en se séparant, n’imaginent pas qu’ils ne se reverront que dix ans plus tard et que cette rencontre sera décisive.

« Dark island » est l’occasion pour Vita Sackville-West de développer un personnage de femme flamboyant et viscéralement indépendant. Shirin m’a beaucoup fait penser à l’héroïne de « Paola ». L’auteur construit son roman son roman en suivant son personnage tous les dix ans en allant de 16 à 46 ans. Shirin n’est pas très sympathique au départ, son comportement surprend.  Elle a épousé en première noce Miles Vane-Merrick (celui de « Haute société ») et a eu des enfants avec lui. Sa présence est très courue dans les dîners, les soirées même après son divorce. Elle fascine, attire les hommes aussi bien que les femmes grâce à son charme et sa répartie. Mais sous le vernis social, Shirin ne semble être attachée à personne. Même ses enfants n’occupent que peu de place dans sa vie. C’est le prix de la liberté. Son indépendance ne supporte aucun lien, aucune obligation envers qui que ce soit. La seule chose qui touche véritablement Shirin est Storn. C’est ce point faible qui la fera céder aux avances de Venn Le Breton. Entre les deux époux s’engage un véritable combat. Venn cherche à dompter Shirin, il veut qu’elle lui appartienne pleinement. Elle se montre une épouse parfaite, attentive mais elle reste insensible à son mari. Son désir absolu de liberté finit par nous la rendre sympathique, on s’attache à ce personnage farouche. Shirin est une femme comme on en rencontre peu dans la littérature : mystérieuse, envoûtante, passionnée et tumultueuse. Comme dans « Toute passion abolie », « Haute société » ou « Paola », Vita Sackville-West crée une forte personnalité, une femme cherchant à être plus libre.

Comme l’indique son titre, « Dark island » est un roman à l’atmosphère sombre, tourmentée. Même si ce n’est pas mon préféré de Vita Sackville-West, je me suis laissée emporter par cette histoire et ce personnage féminin étonnant.Get dressed

30 réflexions sur “Dark Island de Vita Sackville-West

  1. Je n’ai jamais lu un seul Vita Sackville-West, je ne sais pas par où commencer… Quel est le meilleur, pour toi ? Celui-ci a l’air très mystérieux, j’aime beaucoup les personnages de femmes indépendantes. Je le note.

  2. Une lecture qui a l’air très intéressante. Il faut que je lise cette auteure de toute façon mais ce ne sera pas pendant le mois anglais…
    Bon week-end ! 😀

  3. Je vais essayer de lire d’abord ceux qui sont encore dans ma PAL (plus que deux) mais je le lirai, c’est une évidence ! Ton billet et celui de George m’intriguent beaucoup, même si ce n’est pas ton préféré et malgré les réserves de George. VSW fait vraiment partie de mes auteurs préférés !

    • C’est un auteur exceptionnel, j’ai aimé tout ce que j’ai lu d’elle. Celui-ci est un peu à part je trouve, il est vraiment très sombre mais je te le conseille of course !

  4. Je n’ai toujours pas lu Vita Sackville-West. J’en ai plusieurs dans ma PAL. Celui-ci me dit bien. Mais ce n’est pas ton préféré. Tu penses qu’il vaudrait mieux commencer avec lequel?

    • Je conseille toujours mes deux préférés : « Toute passion abolie » et « Au temps du roi Edouard » qui sont tous deux de véritables coups de coeur.

  5. Fascination est aussi un mot qui est revenu dans mon billet. J’ai vraiment succombé à la passion et au drame de l’ensemble de l’oeuvre (et j’ai même réussi à caser Hitchcock dans mon billet^^)

    • Merci pour Hitch !!! C’est un roman très particulier, l’ambiance est étrangère, mystérieuse. Et le personnage de Shirin est fascinant, il n’y a pas d’autre mot ! Je ne risque pas de l’oublier !

  6. C’est effectivement une femme dont on ne peut se détacher, même dans les pages d’un livre. Sa personnalité donne une impression de complexité au lecteur qui restera lui aussi aux confins de ce qu’elle peut penser. C’est très spécial, mais le lien à l’ile de Storn et les différents personnages m’ont permis de passer un vrai bon moment 🙂

    • L’ambiance est vraiment étonnante, envoûtante je dirais. Le personnage de Shirin est surprenant, son fonctionnement nous échappe en partie. Ce qui m’a séduit est sa volonté d’indépendance absolue malgré le fait que celle-ci englobe également ses propres enfants.

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  8. Je ne l’ai pas trouvée antipathique, juste difficile à cerner mais c’était le but de VSW je pense. J’ai aimé l’ambiance lourde et la façon dont elle était décrite, je regrette des éléments romanesques un peu exagérés.

    • Elle m’a semblé antipathique au début car nous ne comprenions pas les raisons de son comportement. Mais elle garde une grande part de mystère. Vita tire le roman vers la tragédie mais je n’ai pas trouvé qu’il y avait des excès, j’étais totalement prise dans l’histoire.

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  10. Comme je viens de l’écrire chez George, je n’ai jamais lu cette auteure mais vos billets me donnent très envie d’y remédier. Ce roman semble vraiment valoir le détour, ne serait-ce que pour rencontrer et suivre Shirin. Et découvrir l’île aussi. J’aime tellement les romans dans lesquels les lieux sont des personnages à part entière, avec une âme, une histoire. C’est envoûtant et émouvant, passionnant aussi, souvent.

    • Tout tourne autour de cette dark island et l’ambiance est très sombre. Je pense qu’il devrait te plaire même si les avis sont plus mitigés ailleurs. Je pense que personne n’oubliera la flamboyante Shirin.

    • Je te conseille « Toute passion abolie » et ensuite « Au temps du roi Edouard ». Si tu n’aimes pas avec ses deux romans, abandonne ! Ces deux romans sont en général les plus appréciés.

    • J’ai aimé tout les romans de Vita que j’ai lu, c’est-à-dire ceux qui existent en français ! Celui-ci est vraiment le plus sombre, le plus noir.

  11. Et toi tu fais partie de celles qui ont aimé… Les filles de cette LC, vous allez me rendre chèvre !!! je le note, je ne le note pas… Le plus simple est de le lire.

  12. Je me souviens de la forte personnalité de Paola, du roman éponyme, c’était une ambiance assez spéciale, concentrée contenue dans un si petit bouquin… J’ai Toute Passion Abolie que je pense lire très vite…celui ci est tentant aussi, les personnalités de l’auteur sont captivantes !! Mais c’est original (et un brin déstabilisateur ?) de ne suivre l’héroïne que par tranches de 10 ans…

    • J’avais commencé par « Toute passion abolie » et depuis je suis une grande admiratrice de Vita. Non je n’ai pas trouvé ça destabilisant de retrouver l’héroïne tous les 10 nas, on suit très bien son parcours et son évolution.

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